11 octobre 2015



« J'accuse »

     Nous sommes entrés dans une nouvelle ère obscurantiste que les médias, la télévision, la publicité, le divertissement, les politiques tendent à promouvoir et à renforcer. Nous sommes entrés dans l'ère de l'illusion, du bonheur illusoire. Le monde autour de nous est empli de paradoxes et de contradictions. Avec l'avènement des réseaux sociaux et des outils ultra-connectés, nous sommes pourtant de plus en plus retranchés dans la solitude, nous devenons de plus en plus individualistes. Nous avons besoin d'Internet, des applications sur smartphone pour séduire, communiquer, établir des liens avec les autres. Ce sont des regards fuyants et timides qui se croisent furtivement dans le métro à l'heure de l'hyper-communication et de l'interactivité universelle. Alors que nous sommes inondés d'informations à longueur de journée et que nous avons librement accès à la culture, notre société décline progressivement : nous nous complaisons dans la médiocrité, nous ne savons plus nous exprimer, nous nous intéressons à des frivolités et des banalités quotidiennes, nous nous laissons aller au voyeurisme en nous nourrissant de télé-réalité et d'images impudentes. Depuis la seconde guerre mondiale, nous avons revendiqué la transparence de l'information. Mais quelle information ? Car c'est bien un flot de non-information qui submerge les écrans de télévision et les journaux populaires. Combler le vide par le vide est devenu une stratégie de manipulation efficace, car cela permet d'éloigner les citoyens des préoccupations importantes et des problèmes sociétaux. Tandis que la Terre vit désormais sur ses réserves, nous continuons de penser à notre confort personnel et à consommer plus que nous ne devrions. Nous encourageons le sport et le business qui l'accompagne tandis que des lois restreignant nos libertés et nos droits sont votées et appliquées.

     La démocratie est morte, mais elle continue d'être maintenue de façon apparente afin de rassurer le peuple et de conforter son rôle au sein du système. Nous votons pour des personnes qu'on a choisies pour nous et nous n'avons jamais le droit d'exprimer nos opinions par le biais de référendums. Car c'est un système ploutocratique, une oligarchie discrète, un fascisme déguisé qui se sont mis en place progressivement ces dernières années, et ce à l'insu de tous. Il est temps de couper les ficelles qui animent nos pantins politiques et de récupérer le pouvoir qui nous a été dérobé par les véritables dirigeants : les banques, les industriels, les multinationales. Ce sont eux qui ont pris le contrôle de nos sociétés et qui nous volent notre liberté en instaurant une nouvelle forme d'esclavagisme. Car oui, nous sommes devenus des esclaves. Contrairement aux esclaves qui peuplent notre imaginaire collectif, nous nous croyons libres, nous nous croyons heureux, car les maîtres qui nous asservissent contrôlent nos esprits et nous conditionnent, dès l'école, à aimer notre servitude. Combien de fois les médias évoquent-ils les bienfaits du travail ? C'est grâce au travail que l'individu peut s'épanouir socialement et personnellement. Ce concept, devenu un leitmotiv au sein de la société exprimé de façon subliminale à l'école, puis relayé par les médias et l'opinion publique, contribue à l'endoctrinement social. Nous ne travaillons pas pour nous, mais pour des puissances omnipotentes qui puisent leur confort et leurs richesses dans notre énergie et notre temps. Nous passons plus de la moitié de nos journées au travail en croyant que cela accroît notre bien-être. Or, cela nous éloigne de nos proches, des loisirs, des plaisirs de l'existence, de la culture, du savoir, du bonheur. Épuisés par les transports et la concentration que requiert un emploi, le salarié ne songe qu'à se vider l'esprit en rentrant chez lui, à se plonger dans des divertissements absurdes qui font plus appel à son émotivité qu'à sa réflexion et qui lui font oublier sa condition. Satisfait par sa stabilité sociale, il n'ambitionne pas un statut ou un confort plus grand et ne craint pas de descendre l'échelle sociétale. Il se complaît ainsi dans une stagnation domestique susceptible de geler son esprit et son sens critique tandis qu'un avenir sombre se dessine autour de lui. La régression intellectuelle, le culte de l'ignorance sont à bannir de nos modes de vie modernes. Nous nous devons, au moins par orgueil, de préserver ce qui fait de nous des êtres humains : la spiritualité et l'éveil de la conscience. Rejetons la pensée unique et commençons à réfléchir sur nous-mêmes, sur ce que nous désirons réellement. Posons-nous les bonnes questions : sommes-nous heureux ou avons-nous décider de l'être – ou plutôt de faire semblant de l'être – parce qu'être malheureux est inconcevable dans une société qui prône le bien-être, le dynamisme, la jouissance ? Une autre société n'est-elle pas possible ? Sommes-nous condamnés à accepter le capitalisme ? Pourquoi ne pourrions-nous prétendre à une existence plus paisible, d'où la prééminence du travail serait exclue ? Sommes-nous véritablement libres dans ces villes de plus en plus surveillées, de plus en plus contrôlées ?

     Big Brother n'est plus très loin. Il se rapproche avec détermination, prêt à s'emparer des âmes des citoyens aveugles. La Loi relative au Renseignement permettant une surveillance massive des Français va entrer en vigueur. Le droit à la vie privée ne deviendra plus qu'un souvenir vague et les individus seront espionnés sans le savoir. Les critères permettant de repérer un éventuel suspect étant tenus secrets, des dérives judiciaires pourront être commises en toute légalité. La sécurité est devenue un prétexte servant le contrôle de la population. La peur du terrorisme permet la mise en application d'une surveillance exacerbée et superfétatoire, sachant que les tueurs islamistes qui sont passés à l'acte étaient déjà fichés et repérés. Cela pose une question troublante : les actions terroristes sont-elles une aubaine pour les dirigeants puisqu'elles accélèrent le processus de contrôle des masses ? Dans un climat de crainte et d'inquiétude, l'abrogation des libertés et des droits fondamentaux se fait plus facilement puisqu'il s'agit de le faire « pour le bien des citoyens ». L'utilisation d'un vocabulaire choisi permet d'ailleurs d'endormir le peuple, de le rassurer quant aux intentions réelles qui menacent sa vie au sein de la communauté. Le terme de « renseignement » qui se veut neutre, sans connotation malsaine, est moins violent que le terme de « contrôle », plus austère, plus arbitraire. Or, le renseignement, c'est-à-dire la connaissance, le savoir, la mainmise sur les informations, favorise forcément le contrôle et le pouvoir. Un Etat qui sait tout de ses citoyens, ses habitudes, ses goûts, ses loisirs, peut agir en conséquence et utiliser cette connaissance dans le but de servir ses propres intérêts. Sur le long terme, une fois la loi adoptée et assimilée, il ne s'agira plus nécessairement de prévenir une quelconque menace terroriste. Tout individu soupçonné d'être une menace contre le système en place pourra être repéré et arrêté. Il faudra donc se fondre dans la masse, devenir le pantin d'un théâtre arbitraire, faire attention à chacun des mots que l'on prononce, aux sites que l'on visite. Il faudra accepter d'être une ombre, une fourmi invisible, car penser par soi-même pourra bien devenir un crime, une menace dangereuse à l'encontre de la stabilité sociale. 



Marine M.

17 commentaires:

  1. Excellent article. Cela résume parfaitement le monde dans lequel nous vivons actuellement. Bon courage pour la suite, j'ai hâte de lire tes prochains articles.

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    1. bravo et merci les éléments du texte de julie parlent . il y a plein de bonnes notions. Actuellement la justice du prolétariat diminue , la justice en général , 2 choses à l'intérieur même de notre démocratie se cache une dictature les entreprises privées qui applique le code du travail quand ces écrits et petit 2 L'Orgueil
      L'Avarice
      L'Envie
      La Colère
      La Luxure
      La Paresse
      La Gourmandise
      prennent un peu plus de terrain chaque jour dans notre quotidien, c'est l’intérêt qu'on cherche chez l'autre. j'ai 30 ans et je ne pense pas vivre de révolution dans notre pays jusque ma mort. trop de drogue circulent pour faire une révolution.

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  2. Tout est dit et bien dit. Je viens de relire et revoir "1984" où big brother est tout puissant. Cependant, dans 1984 la dictature est imposé par le haut, alors que maintenant, elle n'a plus besoin que de notre consentement quand chaque jour nous remettons les clefs de notre liberté aux mains de personnes non-élu (commission européenne, représentant des interccommunalité), ou à chaque fois que nous nous servons d'internet aveuglément. La Boétie l'avait flairé dans sa servitude volontaire, mais nous n'avons plus l'excuse de l'ignorance !

    Magnifique texte que je relaie.

    Bonjour chez vous...

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    1. Je te remercie. Je suis justement en train de lire 1984 dans lequel on retrouve pas mal d'éléments contemporains. J'ai également lu la ferme des animaux qui est facilement transposable à notre époque. Il s'agit toujours des mêmes cochons... Toutefois, je suis d'accord, le danger aujourd'hui vient du fait que c'est le peuple lui-même qui semble accepter le joug de ces nouveaux dirigeants invisibles qui se sont octroyés le pouvoir. Or, l'ignorance, en effet, n'est plus une excuse. Et les gens sont pourtant prêts à voter pour des représentants dont la malhonnêteté est avérée. La Boetie avait bien cerné l'étrange comportement des masses... Même si les gens sont au courant de la tournure malsaine que prend la situation actuelle, ils acceptent l'austérité car cela les arrange que l'on prenne les décisions à leur place. Cela les déresponsabilise en quelque sorte...

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  3. Bonjour à vous,
    Je vous invite si cela n'est déjà fait à lire
    Le Meilleur des Mondes & Retour au Meilleur des Mondes
    de Aldous Huxley qui fut l'enseignant de Orwell.

    Et merci à Julie pour cet excellent état des lieux, je te souhaite bien du succès :D
    Mustapha Menier

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    1. Merci beaucoup :) Quant aux livres, j'ai lu Le Meilleur des Mondes et j'ai adoré. C'est d'ailleurs le Sauvage qui m'a inspiré la fable. Cependant, je n'ai pas lu la suite et je ne savais pas qu'Orwell fût l'enseignant d'Aldous Huxley.

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    2. Ahhh sacrilège!!! ce fut Aldous qui enseigna à Orwell, comment l'inverse eut il été possible... d'ailleurs ce dernier lui envoya son livre 1984.

      https://lejournaldemustaphamenier.wordpress.com/2014/03/12/lettre-daldous-huxley-a-george-orwell/

      S'il faut lire un livre de Huxley c'est après le meilleur des mondes, "l'ile" son livre testament riche d'enseignement.

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    3. Ah oui effectivement, petite erreur d'inattention ! J'ai écrit l'inverse sans faire exprès ^^ Et merci pour ce conseil de lecture :)

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  4. "Soyez résolus à ne point servir, et vous voilà libre"...Ok, cela est bien beau ,mais comment faire quand on est tributaire de sa feuille de paye pour survivre ?
    Un homme seul ne peut rien, sinon "fuir" comme le suggérait l'oublié Henri Laborit, mais fermer la télé ne changera pas le monde.

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    1. Certes, seul, on ne peut rien. Cependant, il est important que chacun prenne conscience du monde qui se dessine autour de nous. La réflexion engendre l'action et les mots peuvent être une arme puissante. Alors bien sûr, on est tributaire de sa feuille de paye, mais on le restera certainement si l'on est fataliste et si le peuple demeure passif...

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    2. Merci de m'avoir répondu.Pour ma part je sens sourdre dans la population une colère qui, progressivement,s'affirme,malgré ce fameux réflexe d'inhibition de l'action qui nous est inculqué depuis la prime enfance. Certains en font un "burn out" (ce qui a été mon cas),mais d'autres, au lieu d'imploser,explosent (cf Air France)...je crains fort que l'avenir soit violent..Mais peut être que l'humanité doit passer par le pire pour obtenir le meilleur.
      Bien cordialement.

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    3. Bonjour. Merci beaucoup pour cet article. Tu as su exprimer clairement ce que je voulais coucher sur le papier de manière maladroite. Je dirai une seule idée supplémentaire à méditer pour ceux qui estiment que l'on ne peut rien faire individuellement et qu'il est plus simple de laisser faire : "Un peuple prêt à sacrifier un peu de liberté pour un peu de sécurité ne mérite ni l'une ni l'autre, et finit par perdre les deux" Benjamin Franklin. Cordialement.

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    4. Bonjour,
      Merci en premier lieu pour cet excellent article.
      Comme début de réponse à 9depack, je te propose de lire le livre de Ramit Sethi, "I Will Teach You To Be Rich". En résumé, il explique comment peut-on devenir rentier en 5 ans avec un salaire normal et en abandonnant tout le luxe inutile que la société de consommation nous fait passer pour indispensable.

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  5. Génial ton article,
    il est si réel. Dans un monde irréel peuplé de zombies...

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  6. Je viens de découvrir ton blog,
    Tu regroupe dans tes textes ma pensée et ça me touche qu'une personne partage mes idées/convictions ( 1984 / meilleur des mondes ne sont qu'une vision de ce qu'allait devenir notre société ....)
    du fond du cœur bonne continuation :)

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  7. Si 9depack , si on ferme la télé , les choses vont changer ! Trop facile de le dire sans avoir essayer ! Pense à tout le temps de disponible que tu auras pour toi , et imagine le monde ailleurs que devant cette boite à mensonges ! Des économies de taxes tu vas faire et une santé de fer tu vas retrouver ! Puis , la bonne claque aux propriétaires des chaines et animateurs chiens de garde du système que tu vas donner , ces gens qui sans vergogne coupent la parole aux invités (ées) quand ils commencent à parler de choses qui dérangent , et une économie réalisée pour toi chez EDF ! Elle est pas belle la vie ?

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  8. Excellent article , Nous devons avoir la même station radio !

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